Jean Paul II, le pape mythique,

par Henri Tincq
LE MONDE | 30.03.06 | 13h38  •  Mis à jour le 30.03.06 | 13h38  

Un pape en vie est vénéré comme un saint. Un pape mort est oublié. Cet axiome que connaissent bien les historiens de la papauté souffre, avec Jean Paul II, d'une remarquable exception. Mort le samedi 2 avril 2005 à 21 h 37, sa gloire, un an après, reste intacte. Deux papes sont aujourd'hui à la tête de l'Eglise : le pape mythique qui règne encore sur les mémoires, les émotions, les esprits. Et le pape qui, sans romantisme, reprend une à une les tâches du gouvernement de l'Eglise. Le pape à la vision planétaire, à l'énergie communicative. Et le pape de la charité - thème de la première encyclique de Benoît XVI -, et d'une intelligence subtile à l'épreuve du réel.

Une dyarchie dont le successeur de Jean Paul II ne donne nullement le sentiment de souffrir, mais qui ne saurait masquer les différences.
 
Jean Paul II fait l'objet d'un culte qui ne se dément pas. Le meilleur baromètre en est l'affluence des foules - entre 12 000 et 15 000 chaque jour - qui se rendent en pèlerinage sur son tombeau dans la crypte de la basilique Saint-Pierre. Décrivant l'agonie du pape défunt, un livre à plusieurs voix - Stanislaw Dziwisz, son secrétaire particulier devenu archevêque de Cracovie, Renato Buzzonetti, son médecin - contribue à l'émotion collective et à la légende. Ce livre, qui s'arrache en Italie, est intitulé Laissez-moi aller vers la maison du Père, les derniers mots, tirés de l'Evangile, que Jean Paul II aurait prononcés avant d'expirer.

Cette liturgie du souvenir est soutenue par le procès en béatification précipitamment ouvert. Le tribunal ecclésiastique chargé d'enquêter sur la cause de Jean Paul II devait conclure le 1er avril la première phase de ses travaux en Pologne. Il a entendu nombre de témoins sur la jeunesse et l'enfance de Karol Wojtyla, avant de se transporter en France où une religieuse - dont on ne connaît ni le nom, ni la communauté - aurait été guérie, en juin 2005, d'une maladie de Parkinson par l'intercession du pape défunt. Un miracle est nécessaire pour faire avancer une cause de béatification.

La papolâtrie survit au pape défunt.

Quant à son héritage, il n'est pas dilapidé, mais repris à nouveaux frais. Sous le masque de la fidélité, l'histoire des papes est faite de discontinuités : entre Pie IX, modèle des papes "intransigeants" du XIXe siècle, et Léon XIII, premier pape de l'ouverture au siècle suivant ; entre Pie X, le pape de l'"antimodernisme", et Benoît XV, celui de la Grande Guerre ; entre Pie XII et Jean XXIII, le pape du concile.

En forçant le trait, on pourrait dire que Benoît XVI gouverne, quand Jean Paul II régnait. Il gouverne à sa manière humble, discrète, sans le panache, ni l'avalanche des discours et des kilomètres. Mais il gouverne et remodèle, avec une telle économie de gestes que le pontificat de Jean Paul II risque de passer bientôt pour une flamboyante parenthèse.

Qui, autre que Joseph Ratzinger, était à même de reprendre en main un gouvernement de l'Eglise laissé à lui-même au profit de voyages planétaires ? De réformer en douceur la Curie romaine, de renouer des liens oecuméniques, de tendre la main aux traditionalistes héritiers de Mgr Lefebvre comme au progressiste Hans Küng, de redonner plus largement leur place aux Eglises locales ? Européen comme Wojtyla, confronté aux mêmes totalitarismes du siècle dernier, bras droit du pape pendant près d'un quart de siècle, aucun doute ne pouvait régner sur sa capacité à maintenir l'héritage. Mais il était le mieux placé aussi pour voir les failles du "système" Jean Paul II, notamment cette hypertrophie du pouvoir pontifical d'un niveau jamais atteint dans l'histoire de l'Eglise.


ACTEUR CHARISMATIQUE


C'est dans un pouvoir recentré sur le coeur de la mission du pape - enseignement, ministère de la charité et de l'unité - que se manifeste le principal changement, un an après la mort de Jean Paul II. Rien n'est spectaculaire, mais tout est fait ou amorcé.

Les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) ne sont plus ce moment de fièvre autour d'un acteur charismatique. Plus question de "surfer" sur la vague des nouveaux mouvements spirituels et de la religion "à la carte". A Cologne, elles ont été une lente pédagogie, sans leçons de morale excessives, invitant les jeunes à rejoindre, en bonne discipline, leurs paroisses et les mouvements classiques. Le succès numérique et médiatique des JMJ risque d'en souffrir, mais c'est un argument qui pèse assez peu pour le successeur de Jean Paul II.

Même constat pour la Curie "montinienne", celle de Paul VI (1963-1978), machine efficace et dévouée, mais obèse. La pesanteur avait fini par trahir les meilleures inspirations du concile, notamment la "collégialité", cet idéal de gouvernement partagé entre Rome et les Eglises locales. Jean Paul II n'a jamais osé s'attaquer à cette institution qui s'est crue d'autant plus libre et puissante que le pape voyageait beaucoup. D'où les incessants procès d'hyper-centralisation sous son règne. Or, Benoît XVI s'est attelé à la tâche. En douceur, il redécoupe les compétences des "dicastères" et les observateurs s'attendent à ce que la Curie soit bientôt dégraissée de 30 % de ses effectifs - renvoyés dans des diocèses qui ont plus besoin de prêtres que de bureaucrates -, à ce que le synode des évêques devienne un jour une instance délibérative et que le Sacré Collège des cardinaux joue davantage son rôle de "sénat" de l'Eglise.

Même évolution en douceur dans le dialogue entre les religions. L'oecuménisme (entre chrétiens) retrouve les rails classiques des rencontres entre théologiens et des visites de courtoisie. En Serbie, en septembre, une nouvelle commission catholiques orthodoxes devrait permettre de surmonter une fracture qui n'a cessé de croître depuis la chute du Mur et une certaine arrogance prêtée à Rome. Benoît XVI rendra également une visite attendue au patriarche de Constantinople, à Istanbul, autant qu'à la Turquie. Et si le pape allemand a repris à son compte la priorité donnée par le Polonais aux "frères aînés" du judaïsme, il manifeste plus de réticence pour l'"esprit d'Assise", le rassemblement, d'égal à égal, des forces religieuses. La déception des rencontres avec les musulmans - évidentes après l'affaire des caricatures de Mahomet - fait place à une stratégie moins naïve et plus ferme.

Une approche réaliste et pragmatique des obstacles qui se dressent sur la route du christianisme a donc succédé au prophétisme de Jean Paul II qui, à la charnière de deux siècles, a marqué l'histoire. Ce "dernier des géants" a rassemblé à ses obsèques, le 8 avril 2005, des millions de fidèles, cent cinquante chefs d'Etat, de gouvernement et de religion. Benoît XVI n'est plus le curé de la planète, mais le pape, modeste et inspiré, d'une transition pour une Eglise moins monarchique, plus collégiale et apaisée.

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par  L'Eglise catholique en France

Les racines de Karol Wojtyla : un pape marqué par les drames du 20e siècle


Karol Wojtyla nait à Wadowice le 18 mai 1920, second fils d’un père militaire et d’une mère institutrice. Deux ans plus tôt, la Pologne recouvrait l’indépendance politique perdue à la fin du 18e siècle.
Karol Wojtyla a été marqué dans sa jeunesse par la disparition de tous ses proches. Il est âgé de 9 ans quand sa mère décède. Quelques années plus tard, son frère aîné meurt prématurément. Puis le père meurt en 1941. Ces épreuves familiales ont pris place dans un contexte historique difficile. Karol Wojtyla a partagé le sort d’une Pologne particulièrement atteinte par les drames du 20e siècle. En 1939, la Pologne perd à nouveau son autonomie avec sa partition entre l’Allemagne nazie et l’URSS. Après la guerre, elle connaîtra le totalitarisme communiste jusqu’en 1989.
Le pape Jean-Paul II visitera la Pologne communiste dès le début de son pontificat en 1979, puis de nouveau en 1983 et en 1987. Les rassemblements populaires suscités par ses visites, son soutien explicite au syndicat Solidarnosc, auront joué un rôle décisif dans la chute du pouvoir communiste en Pologne (1989), premier acte de la débâcle du bloc de l’est. L’action polonaise de Jean-Paul II aura été une des illustrations d’un pontificat marqué par les droits de l’homme et la propagation des conflits armés. En 1979, dès sa première encyclique, Jean-Paul II déclarait : "La paix se réduit au respect des droits inviolables de l’homme […], tandis que la guerre naît de la violation de ces droits et entraîne encore de plus graves violations de ceux-ci".
L’un des derniers combats de Jean-Paul II aura été son opposition au déclenchement de la guerre en Irak par les États-Unis. Le 13 janvier 2003, devant le corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège, il déclarait : "Non à la guerre ! Elle n'est jamais une fatalité. Elle est toujours une défaite de l'humanité".


L’expérience ouvrière dans la Pologne occupée : la préoccupation sociale du pontificat


Avant d’entrer au séminaire, Karol Wojtyla a suivi des études de lettres, à l’université Jagellon de Cracovie. Le travail obligatoire imposé par l’occupant nazi interrompra ses études. A partir de la rentrée de 1940 et pendant presque 4 ans, Karol Wojtyla travaillera comme ouvrier dans une carrière de pierre d’abord, puis dans une usine chimique. Jean-Paul II gardera de cette expérience une grande préoccupation pour les problèmes sociaux.

En 1979, lors de son voyage au Mexique, il déclarait aux ouvriers de Monterrey : "Je n’oublie pas les années difficiles de la guerre mondiale où j’ai moi-même fait directement l’expérience d’un travail physique comme le vôtre […]. Je sais parfaitement combien il est nécessaire que le travail ne soit pas source d’aliénation et de frustration, mais qu’il corresponde à la dignité supérieure de l’homme".
Dans l’encyclique Centesimus annus (1991) Jean-Paul II met également en garde contre une forme radicale de capitalisme : "La solution marxiste a échoué, mais des phénomènes de marginalisation et d’exploitation demeurent dans le monde, spécialement dans le Tiers-monde, de même que des phénomènes d’aliénation humaine, spécialement dans les pays les plus avancés […]. Il y a même un risque de voir se répandre une idéologie radicale de type capitaliste qui refuse jusqu’à leur prise en considération, admettant a priori que toute tentative d’y faire face directement est vouée à l’insuccès, et qui, par principe, en attend la solution du libre développement des forces du marché."


De la résistance par la culture au Conseil pontifical pour la culture


Le jeune ouvrier n’a pas renoncé aux activités culturelles. Il intègre une troupe théâtrale d’avant-garde qui déploiera ses activités dans la clandestinité. Karol Wojtyla écrira plusieurs compositions poétiques et théâtrales dont certaines, comme la pièce La boutique de l’orfèvre, ont eu par la suite un écho en dehors des frontières polonaises.

La création littéraire n’aura pas été délaissée par Jean-Paul II : il sera le premier pape à publier un recueil de poésies (Triptyque romain, en 2003).
L’occupant nazi comme plus tard le pouvoir communiste cherchera à briser les racines culturelles de l’identité polonaise. Les activités estudiantines et théâtrales de Karol Wojtyla constitueront une forme de résistance à l’oppression idéologique et politique. Devenu le pape Jean-Paul II, il déclarera le 2 juin 1980, à l’UNESCO à Paris : "Je suis fils d’une Nation qui a vécu les plus grandes expériences de l’histoire, que ses voisins ont condamnée à mort à plusieurs reprises, mais qui a survécu et qui est restée elle-même. Elle a conservé son identité, […] non en s’appuyant sur les ressources de la force physique, mais uniquement en s’appuyant sur sa culture."


Cette histoire personnelle rencontrait la conviction du concile Vatican II. Celui-ci faisait de la culture l’enjeu essentiel d’une rencontre entre l’Église et les hommes. Jean-Paul II aura donc fait de la culture un axe majeur de son pontificat. En 1982, il crée le Conseil pontifical pour la culture, et en 1993, il lui intègre le Conseil pontifical pour le dialogue avec les non-croyants (créé par Paul VI en 1965). La création de ce nouveau dicastère, présidé depuis le début par le cardinal français Paul Poupard, recevait la mission de promouvoir la rencontre entre les cultures et l’Évangile. Là encore, aux yeux du Pape, un caractère de résistance était attaché à cette mission. En décembre 2000, Jean-Paul II déclarait : "Une culture qui refuse de se référer à Dieu perd son âme en même temps que son orientation, devenant une culture de mort." (Message pour la 34e Journée mondiale de la Paix).


Sacerdoce et vie intellectuelle : un pontificat face aux défis de la foi


Karol Wojtyla entre en 1942 au séminaire de Cracovie. Du fait de l’occupation nazie le séminaire était réduit à la clandestinité. Karol Wojtyla a donc conservé son emploi d’ouvrier pendant les deux premières années de séminaire.

Le 1er novembre 1946, l’archevêque de Cracovie, Mgr Sapieha (que Pie XII venait tout juste de créer cardinal) ordonne prêtre Karol Wojtyla, et l’envoie poursuivre ses études à Rome, à l’université pontificale de l’Angelicum. À Rome, le père Wojtyla sera hébergé au séminaire belge, ce qui lui vaudra de conserver une grande aisance en français. Après avoir soutenu sa thèse en juin 1948 sur le mystique espagnol saint Jean de la Croix, il sera rappelé à Cracovie début 49, pour y exercer une activité pastorale. En 1953, il soutiendra une thèse sur le philosophe allemand Max Scheler, à l’université polonaise Jagellon, fermée l’année suivante par le pouvoir communiste. Professeur vacataire à l’université de Lublin en 1954, il devient titulaire de la chaire d’éthique en 1957. Le pape Jean-Paul II écrira une encyclique sur les fondements de la théologie morale (Veritatis splendor, en 1993), et une autre sur les rapports entre foi et raison (Fides et ratio, en 1998).


Les occupations intellectuelles du père Wojtyla ne l’ont pas empêché de développer une activité pastorale. Celle-ci s’est orientée en direction des jeunes. Jean-Paul II aura conservé, sa vie durant, une réelle proximité avec les jeunes qui s’exprimera de façon particulièrement forte à travers les Journées Mondiales de la Jeunesse ou "JMJ" (dont Paris en 1997, Rome en 2000 et Toronto en 2002). Ce contact privilégié avec la jeunesse aura comporté une double note de confiance et d’exigence. Aux participants des "JMJ" de Rome, Jean-Paul II déclarait : "Il ne vous sera peut-être pas demandé de verser votre sang, mais de garder la fidélité au Christ, oui certainement ! […] En l'an 2000, est-il difficile de croire ? Oui, c'est difficile ! On ne peut pas le nier. C'est difficile, mais avec l'aide de la grâce c'est possible."


Évêque au moment du concile : un pontificat marqué par Vatican II


Le père Wojtyla est ordonné évêque auxiliaire de Cracovie le 28 septembre 1958. Comme tout évêque catholique, il est convoqué au concile Vatican II, ouvert par le pape Jean XXIII le 11 octobre 1962, et clôturé par le pape Paul VI le 7 décembre 1965. Mgr Wojtyla sera invité à apporter sa contribution personnelle au Concile, en étant impliqué dans le travail de rédaction de la constitution pastorale Gaudium et spes.


C’est pendant le Concile, le 13 janvier 1964, que Paul VI nomme Mgr Wojtyla archevêque de Cracovie. Le nouvel archevêque prendra ses fonctions le 8 mars 1964. C’est encore de Paul VI que Mgr Wojtyla recevra le cardinalat, le 28 juin 1967. Du 7 au 13 mars 1976, Paul VI invitera le cardinal Wojtyla à prêcher les exercices de carême de la Curie romaine. Paul VI meurt le 6 août 1978. Mgr Wojtyla est cardinal électeur et prend part au conclave : Jean-Paul Ier est élu le 26 août 1978. Celui-ci meurt un mois plus tard, le 28 septembre 1978. Le cardinal Karol Wojtyla est élu pape le 16 octobre 1978.


Le pape Jean-Paul II se fixera comme objectif la mise en œuvre du concile Vatican II. Le lendemain de son élection, il déclarait : "Nous voulons tout d’abord souligner l’importance permanente du IIe Concile oecuménique du Vatican, et ceci signifie pour nous l’engagement formel de l’appliquer soigneusement."

C’est dans cette perspective que Jean-Paul II réformera le droit de l’Église catholique par la promulgation du nouveau Code de droit canonique, en 1983. Il aura encore voulu offrir un exposé des fondamentaux de la foi catholique, par la publication du Catéchisme de l’Église catholique en 1992. C’est encore l’héritage du concile qui explique l’attachement de Jean-Paul II à l’effort œcuménique.

L’encyclique Ut unum sint de 1995, ouvrant aux communautés chrétiennes non catholiques la discussion sur les modalités d’exercice du ministère pontifical, en sera l’un des signes marquants. Les efforts de rapprochement avec le judaïsme et le dialogue interreligieux seront aussi des aspects du pontificat à situer dans la perspective du Concile. À l’égard du judaïsme, Jean-Paul II posera des gestes hautement symboliques, dont l’objectif sera de favoriser le rapprochement avec l’Église catholique [1]. À cette fin, Jean-Paul II a conduit un "examen de conscience" au sujet des fautes commises à l’encontre des juifs au cours de l’histoire de l’Église [2]. En outre, Jean-Paul II aura donné une visibilité au dialogue interreligieux par exemple à travers sa rencontre avec des jeunes musulmans au grand stade de Casablanca, en 1985, sa visite à la mosquée des Omeyyades à Damas, le 6 mai 2001, et encore les deux rencontres de prière interreligieuse à Assise, en 1986 et en 2002. Tous ces actes procédaient de la conviction du pape Jean-Paul II que le déploiement de l’héritage conciliaire était la manière adéquate de faire entrer l’Église catholique dans le 3e millénaire.

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Les initiatives de Jean-Paul II dans le monde
La place de Jean-Paul II sur la scène internationale
Le rôle de Jean-Paul II dans la chute des régimes communistes à l’Est
Jean-Paul II, un apôtre remarqué de la culture de la vie

  
  
Jean-Paul II a multiplié les voyages dans le monde et rencontré ou reçu la plupart des chefs d’État. À travers lui, la voix de l’Église s’est fait entendre aux tribunes des organisations internationales, où il a milité pour la paix, défendu les droits de l’homme parmi lesquels la liberté religieuse a une place centrale, et aussi prôné une culture de la vie. Il a soutenu le mouvement populaire qui a entraîné la chute du régime communiste polonais et de ceux des autres pays d’Europe de l’Est. Il a œuvré pour développer la pensée sociale de l’Église, et défendu un humanisme chrétien bâti sur l’alliance de la foi et de la raison.


La place de Jean-Paul II sur la scène internationale


Paul VI avait commencé à voyager, mais c’est surtout Jean-Paul II qui a instauré cette image d’un pape pèlerin, multipliant les visites pastorales dans le monde, à l’exception de quelques rares pays comme la Russie, le Vietnam ou la Chine. Ces voyages ont eu un impact à la fois sur les Églises locales et sur les gouvernements en place. Lors de ses déplacements, mais également au cours d’audiences au Vatican, le Pape a ainsi eu l’occasion de rencontrer la plupart des chefs d’État en place et des dirigeants politiques, comme les présidents américains, les leaders européens, Mikhaïl Gorbatchev, Yasser Arafat ou encore Fidel Castro.

Jean-Paul II a profité de ces visites pour faire entendre la voix de l’Église, et pas seulement à l’intention des fidèles. C’est au cours de ses homélies, mais aussi à la tribune des organisations internationales (ONU, UNESCO ou Parlement européen) qu’il a défendu les droits de l’homme, avec au centre la liberté religieuse. Il a tenu le rôle de médiateur (entre l’Argentine et le Chili) et tenté à plusieurs reprises d’arrêter la guerre, notamment par de nombreux appels aux dirigeants au sujet des conflits du Golfe (1991), de la Yougoslavie (1993-94), du Moyen-Orient, de l’Afghanistan (2001), de l’Irak (2003). Il a réuni les chefs religieux à Assise pour prier pour la paix (1986 et 2002).


Le rôle de Jean-Paul II dans la chute des régimes communistes à l’Est


Lorsqu’il était archevêque de Cracovie, il menait déjà un combat remarqué, plus spirituel que politique, contre les entraves mises par le pouvoir communiste polonais à l’exercice du culte. Quand les chantiers navals de Gdansk se sont mis en grève, Jean-Paul II a apporté un appui ouvert au nouveau syndicat libre Solidarnosc. Ses voyages répétés en Pologne durant les années 1980 ont incontestablement guidé le sursaut du peuple polonais et entraîné la chute du régime en 1989. La victoire de Lech Walesa à Varsovie a eu un effet d’entraînement sur le reste de l’Europe de l’Est.

Jean-Paul II a milité pour un renouveau spirituel du Vieux continent qui rassemblerait de nouveau les "deux poumons" de l’Europe, mais il a manifesté dans les années 1990 une certaine déception devant la tournure prise par l’après-communisme dans ces pays. Opposé au système communiste, intrinsèquement pervers à ses yeux par son athéisme et par son matérialisme, il a également émis des critiques sévères contre les excès de la société de consommation occidentale et les dérives d’un capitalisme non régulé faisant peu de cas de la justice sociale. Ses discours comme ses encycliques (Centesimus annus, 1991) mettent l’accent sur la pensée sociale de l’Église.


Jean-Paul II, un apôtre remarqué de la culture de la vie


Jean-Paul II a utilisé ses tribunes au cours de ses voyages, comme lors des audiences au Vatican, pour appeler à une culture de la vie, malmenée à ses yeux par une société devenue trop laxiste et matérialiste. Cette conviction a guidé son engagement constant pour le respect de la vie, aussi bien contre l’avortement que contre l’euthanasie et l’application de la peine de mort. Elle s’est également manifestée à l’occasion des conférences internationales des Nations Unies (Le Caire en 1994 et Pékin en 1995).

Cet ancien professeur d’éthique sociale a construit sa réflexion sur l’idée d’une morale fondée sur la loi naturelle et sur le personnalisme proche d’Emmanuel Mounier, mettant toujours au centre de sa réflexion et de son action la personne humaine. Cela s’est clairement exprimé dans ses différentes encycliques morales (Centesimus annus, 1991 ; Evangelium vitae, 1995).

Ses convictions sur le rôle de la foi dans la société ont été d’autant plus remarquées que Jean-Paul II a usé sur la scène internationale de son charisme, interpellant les fidèles comme les chefs d’État, et n’hésitant pas à recourir aux interviews et aux conférences de presse improvisées dans les avions.

Au sujet du préservatif
Jean-Paul II n’a jamais évoqué directement ce sujet. Mais il a souligné à plusieurs reprises, à propos de la lutte contre le sida, l’importance de la fidélité dans le mariage et, devant les jeunes de Kampala (Ouganda) en 1993, il a insisté sur la place de la chasteté parmi les moyens de lutter contre cette maladie.

La réhabilitation de Galilée
Galilée avait été condamné au XVIIe pour avoir soutenu que le soleil ne tournait pas autour de la terre. Pour montrer que l’Église, qui avait déjà reconnu son erreur de jugement, ne refuse pas le progrès scientifique, cela fut à nouveau solennellement reconnu en 1992 devant l’Académie pontificale des sciences.

 

Tag(s) : #Spiritualités - Religions
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